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Elle n’aspirait qu’à ça. Le repos, enfin, loin des hommes et
de leur agitation, loin des villes et de la chape pesante de pollution qui lui
rongeait les poumons et le moral.
Elle avait passé sa vie à économiser le moindre centime, se
refuser de nombreux plaisirs volatiles, l’esprit fixé sur son objectif final,
pâlissant parfois lorsque les taux de l’immobilier flambaient, lorsqu’il lui
semblait voir son rêve s’éloigner, toujours plus loin.
Mais finalement, ce jour était venu où, après de multiples
alertes paramétrées sur un tas de sites d’annonces, d’enchères et de ventes,
les étoiles s’étaient alignées, et le bien de ses rêves était là, en vente sous
ses yeux, magnifiques photos à l’appui, pour un prix inférieur au montant qu’indiquait
son plan d’épargne logement.
Elle en avait eu les larmes aux yeux et s’était précipitée
sur son téléphone, le cœur battant, ses doigts tremblants peinant à composer le
numéro qui allait, peut-être, changer sa vie.
Et aujourd’hui, de longs mois remplis d’impatience et de
cartons plus tard, le grand jour était arrivé. Celui où elle allait concrétiser
tous ses rêves, où elle allait laisser derrière elle cette peau de citadine qui
la brûlait, cette vie métro-boulot-dodo qu’elle haïssait et qui le lui rendait
bien, empilant devant elle les obstacles comme autant de murs de briques.
Elle attendait le camion de déménagement, trépignant au pied
de son immeuble, s’efforçant d’ignorer les relents de misère de son quartier, la
putridité renforcée par le soleil d’un été sans pitié. Plus que quelques
heures, se disait-elle. Plus que quelques heures et je serai libre pour le restant
de mes jours. Plus que quelques heures et le silence, enfin. Plus que quelques
heures et le grand air, la renaissance. Plus que quelques heures, et une cabane
au bord d’un lac.
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