lundi 26 octobre 2020

[Challenge] Ainsi naissent les fantômes

 #Writober Jour 26 : Ainsi naissent les fantômes. Challenge du bot : 280 mots en 28 minutes. Compte final dans la durée : 699 mots. Je ne suis pas satisfaite du tout, j'étais partie sur une idée, j'ai switché en cours de route, et j'étais partie sur un temps de conjugaison qui s'est avéré très inconfortable au moment du switch. Mais bref, c'est le jeu des one shots ! 


Hector est tombé du toit, où il était monté récupérer le frisbee lancé là par un voisin.

Julie était passée par-dessus le balcon de son hôtel après avoir bu une coupe de champagne de trop.

Ursule s’était tout bêtement endormie au volant, trop pressée de rentrer retrouver son copain après une mauvaise journée.

Anthony s’était électrocuté en cherchant à réparer un grille-pain défectueux.

Pierrick s’était brisé la nuque sur le rebord de son lavabo en dérapant au sortir de la douche.

Ils étaient des centaines de milliers, comme ça, à affluer tous les jours aux portes de l’Antre-Monde, de longues files de gens, transparents et égarés, cherchant à comprendre ce qui leur était arrivé.

La salle d’attente d’Angie ne désemplissait pas, et elle était fatiguée de son job. Accueillir les « morts ratées », ce n’était pas le meilleur emploi du monde. Expliquer aux gens qu’ils avaient passé l’arme à gauche avant leur temps, à cause d’un stupide accident, ne les rendait pas spécialement heureux.

Certains se résignaient, et pouvaient passer les portes, et poursuivre leur chemin. Parfois, Angie se demandait ce qu’il y avait derrière les portes, ce qui attendait les morts après, mais sa mission s’arrêtait là, et bien qu’elle s’ennuyât au possible, elle était bien trop respectueuse de la Loi pour la transgresser.

Les cas impossibles, les agressifs, les désespérés, tentant de négocier une deuxième chance, l’opportunité d’y retourner et de recommencer, étaient redirigés vers Damon.

Damon tenait le bureau opposé à celui d’Angie. Il était d’une beauté à couper le souffle, et d’une froideur à percer les cœurs. Il était en charge des retours à la Terre. Angie était liée au silence, mais elle avait souvent envie de hurler aux gens de refuser le deal proposé par Damon. Un soir, à la fin d’une trop longue journée, il était venu s’asseoir sur le rebond de son bureau, appuyé sur ses mains fines derrière lui, la tête rejetée en arrière, les yeux plissés dans une expression illisible.

« Angie, baby, les affaires ont été bonnes aujourd’hui. »

La jeune femme s’était contentée de hausser les épaules. Inutile de s’engager dans un débat éthique avec Damon, après tout.

Il avait basculé son poids sur sa main droite, levant la gauche pour caresser la joue d’Angie du bout des doigts. « Ce n’est pas grave, mon ange, avait-il dit doucement. Déteste-moi autant que je t’aime, nous sommes liés jusqu’à la fin des temps. »

Là, elle lui avait jeté un regard noir qui l’avait fait ricané. Damon lui avait sourit d’un sourire radieux, avant de poursuivre : « Sais-tu, baby, ce que je fais de tous les clients que tu m’envoies ? ». Sa voix était un murmure hypnotique, et malgré elle, Angie se penchant vers le jeune homme. Il attendit qu’elle lève les yeux vers lui, et lui faisant un clin d’œil, poursuivit avec délice : « J’en fais des fantômes ! »

Il avait éclaté de rire, fier de lui, alors qu’Angie le dévisageait d’un air choqué.

« Ne fais pas cette tête, mon ange. C’est hilarant après tout. Ils veulent une deuxième chance alors qu’ils ont gâché la première. Pourquoi devrait-on leur offrir la possibilité de recommencer ? C’est un cadeau précieux, qui se mérite ! Alors je les renvoie chez eux, créatures éthérées et invisibles, ou presque. C’est une chasse au trésor, bébé, donc le premier prix est l’humanité. Si, en temps que fantômes, ils résolvent tous les problèmes que je place sur leur chemin, alors ils peuvent repartir de zéro. Sinon, pfft ! »

Il avait fait un geste étrange de ses mains qu’Angie avait refusé de comprendre. Une partie d’elle avait envie de croire qu’il n’était pas si mauvais, s’il offrait une autre chance à des âmes égarées, mais avant qu’elle ait eu le temps de s’attendrir, un long nez fin lui avait caressé la joue, et Damon, penché tout contre elle, avait murmuré à son oreille : « Et tu veux savoir le meilleur ? Je ne leur dis rien ! Je les renvoie tels quels, persuadés qu’ils retournent à leur misérable existence ! »

Il avait éclaté de rire, et un frisson glacé avait parcouru Angie.


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